EAUX MINÉRALES & THERMALES de BERTHEMONT - ROQUEBILLIERE |
A Messieurs les Membres de la Société Médicale de Nice. Messieurs, Ce travail est, dans sa première partie, l'historique très abrégé des eaux minérales de Berthemont. La deuxième partie est la topographie de cette admirable contrée; j'ai copié un feuillet de la nature. Enfin, la dernière partie, qui est l'exposé très succinct des analyses faites jusqu'ici par divers savants et le récit fidèle de mes propres appréciations, traite des propriétés chimiques, physiques et médicales de ces eaux. L'unique but de ce rapport, Messieurs, est d'appeler toute votre attention sur des sources qui doivent, très certainement, rendre les plus grands services à notre département et enrichir notre ville de Nice par leurs propriétés médicales et leur proximité.
PREMIÈRE PARTIE. Historique. Si nous jetons un coup d'œil sur les diverses histoires écrites sur Nice et les Alpes-Maritimes (1), nous voyons que, dès l'an 261 de l'ère chrétienne, les eaux minérales et thermales de Berthemont (Roquebillière) avaient leur réputation médicale, comme Nice avait déjà la sienne pour la bonté et la douceur de son climat. L'impératrice CORNELIE SALONINE fut envoyée à Nice à cette époque, sur les conseils de ses médecins, pour réparer sa santé épuisée. Cette impératrice ayant trouvé sa guérison sous l'influence du beau ciel de Nice et des eaux minérales de Berthemont, voulut donner une preuve éclatante de sa reconnaissance aux habitants de ces pays, et, suivant les inspirations de son âme généreuse, elle les prit sous sa protection, ( PAULUS ORASIUS, in annal. GALLIEN, ZONARAS, TREBELLIUS POLLIO, de antiq. hist. natur. ) leur fit accorder la liberté de conscience et de culte, arrêta les persécutions du féroce Claudius, alors préfet de Nice, qui leur imposait l'adoration de Jupiter, d'Apollon, de Diane et de Junon dont les temples en ruines existent encore à Cimiés et à Bendejeun (Bona Junonis), commune de Châteauneuf; elle mit enfin un terme à l'œuvre du bourreau dont la hache venait de faire tomber la tête de l'évêque martyr Pontius. (BARONIUS, Annal. Christ. GIOFFREDO, Nie. civit., monument. illust.,lib. II, pag. 75) Les populations, en souvenir des bienfaits de l'impératrice Cornélie Salonine, lui firent élever sur la porte principale de Cimiés un monument public dont Gioffredo, Sulzer et Papon découvrirent l'authenticité par cette inscription :
CORNELLE SALONINÆ
On ne peut donc mettre en doute que du temps des Romains,
comme aujourd'hui, la beauté du ciel, la douceur du climat de Nice et les
eaux minérales et thermales de Berthemont jouissaient d'une grande
célébrité. DEUXIÈME PARTIE. Topographie.
Berthemont est un village agréablement situé, à huit
lieues de Nice, à une heure des frontières d'Italie; son élévation,
au-dessus du niveau de la mer, est d'environ mille mètres. Trois
diligences font le service tous les jours de Nice à
Roquebillière en six
heures; des mulets font celui de Roquebillière à Berthemont en une heure.
Le parcours de Nice à Berthemont côtoie une longue chaîne de montagnes
échelonnées qui se déroulent successivement aux regards du voyageur, en
lui offrant un magnifique panorama des merveilles de la nature. Au
milieu de ces montagnes, sur la commune de Duranus, si l'on s'arrête un
instant à l'endroit dit le saut des Français, près d'une croix en bois,
l'œil ne peut, sans effroi, mesurer la profondeur des sites sauvages que
l'on domine. L'étendue de l'abîme n'est réellement mesurable que par le
bruit sourd et engouffré du torrent. A la chute du jour, au moment où le
crépuscule envahit l'atmosphère et où les étoiles sortent une
à une des ténèbres comme autant de réalités éternelles cachées dans
les profondeurs de l'infini, cette gorge ne parait plus que comme un
gouffre noir s'enfonçant dans le flanc des montagnes. Le spectacle est
encore plus saisissant dans la saison où le vent achève la chute des
feuilles et par un beau clair de lune. Les voyageurs attardés ne peuvent
s'empêcher alors de penser aux innombrables histoires et légendes des
anciens barbets de la contrée. L'aspect sauvage de ce lieu, où se sont
commis tant de crimes, "parait hérissé de pièges affreux. Dans la
nuit tout épouvante et prend, avec l'ombre, des formes suspectes; les
anfractuosités que l'on distingue parmi les rochers paraissent des
fosses entrouvertes, autour desquelles semblent rôder des silhouettes
farouches pour surveiller les cadavres, victimes de la superstition et du
crime. Les scènes de rage implacable et l'éternelle désolation laissée
aux familles des malheureuses victimes, se représentent plus vives que
jamais à l'esprit. Rien n'est plus majestueux le jour que cet endroit,
rien n'est plus effrayant le soir, rien n'est plus sinistre la nuit. La
route, en quittant Nice, longe le Paillon; et, après une demi heure de
parcours, laisse, sur la gauche, l'abbaye de St-Pons qui fut fondée en
775; à peu de distance on voit poindre les ruines d'une antique chapelle
qui couvrent un roc coupé à pic; la tradition, dit Roubaudi, raconte que
c'est là que fut décapité St-Pons. On arrive ensuite à une gorge que borne au fond le château de St-André
pittoresquement bâti sur un
rocher, tout couvert, au midi, de cactiers - raquettes, d'agaves
d'Amérique, et ombragé, au nord, par des tulipiers gigantesques.
Derrière ce château, à un quart de lieue de distance, on aperçoit une
grotte en pierre de tuff, dont la voûte sert de pont à la route qui
vient de traverser le village de St-André; a cet endroit elle offre aux
regards des sites agréables et des échappées de plus en plus
pittoresques, à chaque détour que fait la route entre les montagnes
agrestes, elle rappelle celles de la Suisse et de la Savoie. On traverse
les villages de Tourrettes, Levens, pays natal du général Masséna, le
Gros d'Utelle situé au bord de la Vésubie et entouré de magnifiques
oliviers, Duranus, autrefois l'antre des barbets, un petit tunnel de quarante à cinquante mètres de longueur taillé dans le roc; on descend
ensuite la montagne, et, après avoir passé le village de la Rivière, et
laissé à gauche le couvent des Cordeliers avant d'entrer à Lantosque,
ou continue jusqu'à Roquebillière, en laissant sur sa droite la Bollène
et Belvédère sur le versant d'une montagne couverte de riantes cultures.
Très prochainement, les travaux en cours d'exécution pour atteindre St-
Martin-Lantosque seront achevés. Depuis le village de la Rivière
jusqu'à St - Martin-Lantosque la route longe la vallée de la Vésubie.
Cette belle vallée est inondée de lumière dès le point du jour. Le
ciel y rayonne dans sa majestueuse sérénité. Le climat y est fort doux.
La nature y semble sourire en voyant la nouvelle voie de communication
lui apporter la richesse et le bonheur. TROISIÈME PARTIE ART. 1. Sources et Bains.
II existe à Berthemont neuf sources principales d'eaux
minérales et une d'eau commune. Les quatre premières étant chaudes, on
les divise en sources thermales et en sources froides. Voici leurs noms et
leur température: ART. 2. Quantité.
L'on pensait, ayant la récente
découverte des trois dernières sources sulfureuses de Berthemont, que
ces eaux thermales n'étaient peut- être pas suffisantes pour alimenter
un établissement de bains. Ce doute a cessé lorsque joints aux 38 litres
1/2 d'eau par minute, indiqués dans l'origine par Gioffredo, et aux 10
litres 1/2 de la source St-Jean, mentionnée pour la première fois par
Risso, les 51 litres provenant des dernières sources mises à jour sont
venus élever à 100 litres par minute la quantité totale qui est ainsi
répartie:
En déduisant la source de St-Michel froide, ne devant être
utilisée qu'en boisson, 4 litres 1/2 sur . . . . . . 100 Reste à
employer pour bains 95 litres 1/2. ( Après les fouilles du 10 janvier
1865). ART. 3. Propriétés physiques. Les six premières sources sont sulfureuses; elles ont pour principe minéral fixe le sulfure de sodium qui leur donne une grande analogie avec les eaux sulfureuses des Pyrénées, avec celles de l'intérieur de la France, de l'Italie, de l'Allemagne et de la Suisse. Les sources sulfureuses sont limpides, très bitumineuses et oléagineuses; leur odeur est celle des œufs couvés; leur saveur est fade, nauséabonde et douceâtre. Les septième, huitième et neuvième sont ferrugineuses, limpides et inodores avec sensation de slypticilé et d'astriction très peu prononcée. La dixième est potable; elle vient des hautes montagnes; elle est très-fraîche, limpide, légère, de facile digestion et fort agréable à boire. ART. 4. Analyse chimique.
Voici celle de M. Roubaudi. Sources thermales. Eau, deux litres.
Fluides aériformes, gaz, acide hydrosulfurique, gaz acide carbonique, gaz
azote, quantité indéterminée. Matières fixes. Hydrosulfate de soude
. 6,00 Hydrochlorate de soude . 0,05 Sulfate de chaux . 0,04 Sulfate de
soude . . 0,10 Silice 0,05 Matières végétales animales, quantité indéterminée. ART. 5. Propriétés médicales. Quoique les analyses faites jusqu'à ce jour se complètent à peu près l'une par l'autre, il reste encore à désirer que le nouveau propriétaire les lasse continuer pour préciser les principes minéraux déjà aperçus et ceux qui sont probablement encore inaperçus. Cela dit, nous allons indiquer les principales propriétés médicales de ces eaux. Leur analogie avec la plupart des eaux sulfureuses facilitera beaucoup notre travail , ainsi que les observations et les rapports faits par les praticiens distingués de Taris, de Londres, de Turin , de Nice et des localités environnant Berthemont, sur lesquels est basé ce rapport. Les restes des masures que l'on voit sur le bord des sources et les anciens vestiges d'établissements thermaux démontrent qu'on avait constaté, dès la plus haute antiquité, les heureux effets de ces eaux sur un grand nombre de maladies. Ces effets sont encore confirmés par le grand nombre de malades, venant de tous les pays, malgré l'absence de chemins et d'habitations, s'installer, chaque année, dans les environs des sources, pour y chercher leur guérison. Si ces eaux possèdent quelques propriétés que n'expliquent pas les principes révélés par les analyses faites jusqu'à ce jour, on ne peut pas pour cela en nier les propriétés dès que des faits bien établis les démontrent. Ne voyons-nous pas des rivières et des sources d'eaux potables et ordinaires, comme celles d'Arcueil, de la Seine, etc., etc., donner à l'analyse les mêmes principes que d'autres eaux très actives comme, par exemple, celles de Plombières, Gastein, etc., etc. ? Ici, certainement, les principes inconnus et les combinaisons inappréciables, comme le dit notre collègue Constantin James, agissent seuls. Les anciens se servaient aussi des eaux minérales ; ils n'avaient pas, pour se guider, les analyses chimiques. Le corps de l'homme était le seul réactif dont ils pouvaient disposer. L'électricité joue aussi un grand rôle dons les eaux minérales. On connaît les belles expériences de M. Scoutetten qui, au moyen d'un galvanomètre très sensible, a prouvé, à l'Académie de médecine de Paris que, pendant que l'eau pure des ruisseaux et des fleuves ne faisait éprouver à l'aiguille aucune déviation, les eaux minérales lui imprimaient, au contraire, des écarts plus ou moins considérables, quand le corps humain ou une partie du corps, la main, par exemple, était mise en contact avec le liquide expérimenté. Cet été, nous avons pu constater sur nous-même et sur un assez grand nombre de personnes malades, soit dans l'établissement, soit dans les habitations voisines, l'efficacité médicale de ces eaux, et ce sont ces observations qui, jointes a celles que nous avions déjà faites depuis plusieurs années, et à celles de nos collègues, nous permettent de donner aujourd'hui une succincte énumération de leurs propriétés. Les eaux thermales de Berthemont offrent peu de différence avec les froides par leur saveur et leur odeur. Elles stimulent les membranes muqueuses gastro-intestinales; et, suivant qu'elles sont plus ou moins bien digérées, ou qu'elles sont prises avec plus ou moins de discernement, elles déterminent l'augmentation de l'appétit ou l'inappétence, la constipation ou la diarrhée. Lorsqu'elles produisent les phénomènes saburaux avec ou sans sentiment d'ardeur intérieure, avec de l'insomnie et de l'agitation, il faut en diminuer la quantité, ou même les suspendre momentanément. Quelquefois elles agissent sur l'encéphale et déterminent une ivresse passagère; souvent elles finissent par amener une sueur abondante, des exanthèmes ou un écoulement abondant d' urine. A l'intérieur et à l'extérieur, les eaux des sources sulfureuses peuvent être recommandées dans les maladies de la peau, contre la disposition aux érysipèles, furoncles et surtout dans les affections herpétiques anciennes, sans phlegmasie locale. Certaines affections chroniques des organes de la poitrine peuvent être avantageusement combattues par ces eaux. Dans cette catégorie sont le catarrhe du larynx et des bronches, simple ou compliqué de tubercules; le catarrhe pulmonaire, la pneumonie, la pleurésie, l'asthme et la phthisie, surtout lorsque le malade est d'un tempérament lymphatique et que ces différentes affections résultent de la rétrocession des principes rhumatismaux , goutteux ou psoriques. Biett recommande des eaux analogues aux tempéraments lymphatiques. Richelmi , en faisant l'historique des eaux minérales de l'Italie disait: On trouve à Berthemont, paroisse de Roquebillière, la source St-Jean-Baptiste, de nature hépato-sulfureuse, reconnue utile dans quelques cas de phthisie pulmonaire et celle de St- Julien, bitumineuse, qui réussit également dans quelques variétés de celle maladie. Le docteur Salles-Girons, en parlant des eaux sulfureuses froides de Pierre-fonds ( que l'analyse place à coté de celles de Berthemont), à démontré, par de nombreuses observations, qu'elles jouissent d'une efficacité très réelle dans le traitement des maladie de l'appareil respiratoire. Nous avons aussi, devers nous, des observations qui confirment ces résultats; elles feront, avec celles que plusieurs de nos confrères nous ont déjà communiquées ou nous communiqueront, le sujet d'un nouveau travail. Convaincu, comme beaucoup de praticiens, de la possibilité de la guérison de la phthisie, question que nous avons déjà traitée dans diverses brochures ( Recherches sur la nature et le traitement de la phthisie 1856 Nice Effets curatifs de l' eau de mer, 1858 Inhalation de l' eau de mer, 1860), nous croyons devoir insister sur la possibilité de cette cure par les eaux sulfureuses de Berthemont. Darralde affirme la véracité de celle cure ; il s'exprime ainsi: " II faut toutefois en excepter la phthisie aiguë, qui est, en général, la phthisie accidentelle non circonscrite. " Cependant, il ajoute: " Dans ce cas, il faut, avant tout, combattre cet état aigu par les traitements appropriés. Une fois qu'on s'en est rendu maître, on peut avec sécurité recourir aux eaux minérales, a la condition, toutefois, qu'on apporte la plus grande réserve dans leur usage, de crainte de réveiller l'état aigu ou phlegmatique dont le retour pourrait tout compromettre. S'agit-il, tout au contraire, de ces phthisies à marche lente, passive, atonique qui reconnaissent comme point de départ une diathèse particulière aux tempéraments strumeux , diathèse le plus souvent con- géniale ou héréditaire; s'agit-il encore de cette phthisie fortuitement développée chez des individus que leur constitution en aurait certainement garantis, si elle n'eût été débilitée par dos maladies longues , un mauvais régime, un climat insalubre, des excès de toute nature; en un mot, par l'une ou l'autre de ces causes qui appauvrissent le sang et énervent l'économie, les eaux minérales, dans ce cas, loin d'être nuisibles, doivent être regardées comme le remède par excellence. C'est un point établi, qu'il n'existe point de limite à leur puissance curative. Ainsi, que la phthisie soit au premier degré, au second ou au troisième, vous ne devez pas désespérer des eaux, du moment que l'ensemble de l'organisme se trouve encore dans d'assez bonnes conditions de conservation. " Le docteur Allard recommande, dans la phthisie, les eaux de St-Honoré (Nièvre) qui sont on peut dire identiques avec celles des sources St-Jean-Baptiste et St-Julien. Nous pourrions citer encore un grand nombre de sources minérales analogues re-commandées avec succès dans la phlthisie, si le cadre de ce travail le permettait. Le projet de créer dans l'établissement de Berthe-mont une salle d'inhalation où les malades pour- raient respirer non seulement les principes gazeux contenus dans ces eaux, mais encore l'eau elle-même pulvérisée avec ces principes fixes, nous engage à parler, dès aujourd'hui, de ce mode de traitement qui y a été déjà employé, mais d'une façon tout à fait rudimentaire, par une station plus ou moins prolongée du malade assis sur le bord des sources ou par l'entretien dans la chambre du malade d'un vase plat contenant un ou deux litres de ces eaux que l'on renouvelait au moins malin et soir. Le docteur Salles-Girons, qui expérimente chaque année, par la pulvérisation, les eaux sulfureuses de Pierre-fonds, sœurs, comme nous l'avons déjà dit, de celles de Berthemont, obtient, par cette méthode, de bons effets dans toutes les affections de la poitrine. La respiration des gaz sulfureux a été mise en pratique par les anciens. Gallien envoyait ses malades auprès des volcans pour respirer les vapeurs sulfureuses. Pilh dit: " L'air qu'on respire à Ax ( Ariège) est un remède pour les malades menacés ou attaqués de phthisie, d'asthme, etc. La propriété des gaz est duo au souffre qu'ils tiennent en suspension. " Si nous jetons un coup d'œil sur les divers comptes-rendus de la plupart des eaux des Pyrénées, de la Suisse, de l'Allemagne, de l'Italie, telles que celles de Coleret, de Bagnère, de Luchion, d'Amélie-les-Bains. de Barèges, Aix-en-Savoie, Challes, St-Gervais, Enghieu, Aix-la-Chapelle, etc., etc., eaux analogues à celles dont nous faisons l'historique, ne voyons-nous pas qu'elles sont recommandées avec succès dans les affections de poitrine par nos célébrités médicales? La phthisié, même celle qui finit, est susceptible de thérapeutique, et le traitement par les eaux sulfureuses est un de ceux qui méritent la préférence. Telle est la conviction qui résulte de vingt ans d'études, on la pratique a toujours marché à côté de la théorie. Nous disons encore, avec le docteur Salles-Girons: " Eh bien ! est-ce que dans un corps qui vit, qui fait assez bien les fonctions les plus nécessaires au soutien de l'économie et qui va et vient, comme celui des phlhisiques, qui ne manifeste à l'auscultation que le premier ou le second degré des tubercules, est-ce que, dis-je, dans ces conditions on peut dire qu'il n'y a rien à faire? La bonne médecine, la vraie, à notre avis doit être comme le malade, jamais désespérée et toujours ayant quelque chose à faire. La négation n'y doit arriver qu'à l'heure de la mort. Il y a trop d'inconnu dans la vie pour que le médecin puisse être justifié de l'abandon d'un malade. " La thérapeutique n'est pas seulement la science de guérir dans le sens strict du mot ; il faudrait, hélas! en désespérer trop souvent; elle est bien mieux la science de faire vivre, et elle n'en est pas moins belle lorsqu'elle dispute au mal le terrain pied à pied et qu'elle en recule la fatale victoire. Vous me pardonnerez cette digression, Messieurs, en considération du désir que nous avons de faire partager notre opinion sur Ia possibilité de la guérison de la phthisie. Les affections qui pourront aussi être traitées avantageusement par ces eaux, sont les blessures et les plaies chroniques. Le rachitisme, les engorgements glanduleux, sont modifiés et améliorés. Les enfants faibles obtiennent aussi d'heureux résultats, comme nous avons pu le constater. Les bains de ces eaux sulfureuses aident beau- coup les traitements hydrargiques chez les personnes atteintes d'exostoses, de syphilides. Comme le dit Pâtissier, elles peuvent aussi réparer les ravages de ce traitement, prises en boissons et en gargarismes. Elles cicatrisent les ulcères de la bouche et du voile du palais, raffermissent, en rendant a l'estomac et au coeur, l'énergie qu'ils ont perdue; elles dissipent la maigreur et rendent au malade les forces. Comme eaux thermales, elles ont une grande efficacité contre les rhumatismes, la sciatique, le lombago. Les aigreurs rebelles, lorsqu'on a lieu de soupçonner, par les causes qui ont précédé, que ces accidents sont dus à l'atonie du tube digestif, cessent ordinairement par l'emploi de ces eaux ; les pâles couleurs, la débilité générale, les leucorrhées, les engorgements vasculaires de la matrice, la stérilité, le catarrhe chronique de la vessie, peuvent aussi être combattus par leur usage, il faut éloigner de l'emploi de ces eaux, les personnes d'un tempérament sanguin, pléthorique, disposées aux congestions cérébrales, à l'épilepsie, aux anévrismes, ainsi que toutes celles qui sont atteintes de maladies d'un caractère un peu aigu, comme le cancer, le scorbut et la goutte, etc. ART. 6. Mode d'administration. On fait usage de ces eaux en boisson, respiration, douches, injections, bains et lotions. Leur dose en boisson est de deux à quatre verres et même six, suivant la tolérance de l'estomac, en vingt-quatre heures. Ces eaux sont très transportables. ART. 7. Propriétés médicales des eaux ferrugineuses de Berthemont. - C'est surtout dans les maladies qui paraissent résulter d'une diminution dans le sang, de la proportion normale du fer, que ces eaux conviennent. Les excellents résultats de ces eaux, qui ne paraissent guère d'abord devoir être en rapport avec la petite quantité du fer qu'elles contiennent, peuvent être attribués à l'association du fer avec l'acide carbonique. Ces eaux sont facilement tolérées par l'estomac; elles augmentent l'appétit, facilitent la digestion, impriment à l'organisme un caractère de force et de bien-être, qui se traduit à l'extérieur par un teint clair, plus animé, et par un accroissement de gaîté, d'agilité et de force. Ces phénomènes apparaissent surtout chez les jeunes filles au teint pâle, chlorotique, anémique, et, dans tous les cas où il est nécessaire de donner du ton aux organes et de fortifier la constitution en agissant sur le sang même. Elles peuvent être conservées très bien , même après le transport, et utilisées dans les mêmes circonstances. ART. 8. Hygiène du buveur d'eau minérale. A la pointe du jour, dans la belle saison, on va boire les eaux à la source. On les prend par verres de 150 à 200 grammes, dont on augmente le nombre, selon la tolérance de l'estomac. On laisse entre chaque verre un intervalle d'un quart d'heure, d'une demi-heure, que l'on consacre le plus souvent à un exercice modéré. Lorsqu'on boit à la source, il faut avaler tout d'un trait, sans donner le temps à l'eau de perdre son gaz et sa chaleur. Si on envoie chercher l'eau au lieu de la boire à la source, il faut l'enfermer dans un vase qui s'oppose à l'évaporation des principes volatils. On peut aussi boire les eaux dans les bains, dans le lit, ou en se promenant selon qu'elles passent mieux. L'eau passe bien lorsqu'elle ne pèse pas sur l'estomac, n'excite pas d'envies de vomir, ne cause, ni gène, ni douleur de tête, et qu'au bout d'un quart d'heure, d'une demi-heure, on se sent disposé à boire un second verre. Si on ne suit pas cette marche et que l'on fasse comme beaucoup de baigneurs que l'on a vu de tout temps, dans tous les établissements, on compromet plus ou moins le succès de la cure. Pline s'en plaignait " bon nombre de malades dit-il, se font gloire de rester plusieurs heures de suite dans des bains très-chauds, ou de boire l'eau minérale outre mesure, ce qui est également dangereux. " II ne faut jamais commencer par boire une grande quantité d'eau; cette conduite occasionne des pesanteurs d'estomac, des douleurs générales, des gastrites, des fièvres inflammatoires, bilieuses, et des insomnies qu'il faut éviter chez les personnes épuisées, et en général, les femmes qui ont leurs époques doivent suspendre le traitement minéral qui leur est souvent trop excitant dans ce moment. Il ne faut déjeuner qu'une heure ou deux après avoir cessé de boire, lorsque l'on sent l'estomac entièrement libre et le besoin de prendre quelques aliments. On ne doit pas terminer l'emploi des eaux d'une manière brusque; mais, sur la fin, diminuer progressivement la dose et revenir à la quantité par laquelle on a commencé. (PATISSIER). ART. 9. Hygiène du baigneur. II faut s'abstenir du bain lorsque le corps est très fatigué ou en sueur, Pâtissier ajoute; "et ne jamais y entrer que trois ou quatre heures après le repas et autant que l'on ne ressent pas de pesanteur à l'estomac; l'oubli de cette précaution a souvent occasionné des accidents jusqu'à l'apoplexie. Pendant la durée de leurs menstrues, les femmes doivent s'éloigner du bain. Il n'est pas toujours indifférent de se plonger dans un bain ; le poids que l'eau exerce à la surface du corps étant en raison directe de la masse de liquide. // est toujours à propos au malade d'être fixé sur la chaleur que doit avoir son bain devant être relative à sa maladie. C'est ordinairement le matin à jeun que l'on va an bain ; en général, un seul bain suffit. Lorsque les bains très chauds sont indiqués, l'on n'y arrive que graduellement, et lorsqu'on aura atteint la température voulue, les bains chauds seront de courte durée. On peut boire avec avantage les eaux minérales pendant la durée du bain. En général, il faut alors se dispenser de manger; mais si le malade éprouve de la faiblesse, une défaillance, on peut lui donner du bouillon. Quelquefois les vapeurs d'eau minérale occasionnent la syncope, qui cesse dès que le baigneur respire un air frais, ou qu'on lui fait boire un peu de vin pur. La durée du bain chaud est de quinze à vingt minutes; il faut en sortir dès que l'on éprouve des anxiétés, des étourdissements, un peu de vertige. La durée du bain tempéré de 30 à 32 degrés est d'une demie heure à deux heures, et même davantage, selon l'état des forces du malade et des besoins de la maladie. Au sortir de ces bains il faut se garder de l'impression du froid pendant tout le reste de la journée : il est même souvent utile en sortant du bain tempéré de mettre dans un lit chaud le malade, s'il est excessivement débilité. Si l'excitation produite est trop vive, en sortant du bain le malade prend un pédiluve dans l'eau thermale, principalement s'il y a tendance aux congestions cérébrales. Les baigneurs doivent toujours être chaudement velus, et s'abstenir des habits d'été ; la transpiration est essentielle, pendant le traitement, par les eaux thermales. " docteur POLLET. NICE, 1865
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