Dans le premier bulletin du G.I.E.T. daté du mois de mai 1971, l'un des
buts de la création du groupe consistait à retrouver la trace et
l'activité des Templiers. Dans notre département, la tâche est
difficile, car les archives provenant de l'Ancien Comté de Nice, sont en
partie perdues. Mr Durbec a effectué un travail monumental en ce qui
concerne les établissements des Templiers dans l'ancienne Provence.
Malheureusement ce dernier a dû arrêter son labeur aux rives du Var (la
rivière), et bien qu'il ait traité dans certains de ses articles de
commanderies situées dans l'ancien Comté, il faut avouer que l'on ne
possède que très peu de renseignements. Ce qui oblige les chercheurs à
travailler sur le terrain et cela en fonction de découvertes
fortuites...
L'église de Roquebillière en est un exemple frappant. Devant le peu de
documents, nous sommes obligés de considérer certains détails ou
certains indices.
1) Situation géographique
De Nice, prendre tout d'abord la direction de Digne et Grenoble par
la R.N. 202, plus connue sous le nom de plaine du Var, face à l'aéroport
Nice Côte d'Azur. Arrivés au petit village du Plan du Var, vous
franchirez un pont et emprunterez la N 565 juste à votre droite en
direction de Saint Martin Vésubie. Il faut compter 25 km pour atteindre
Roquebillière Vieux. Une fois à Roquebillière, et bien que vous puissiez
arriver à l'église en voiture, il est préférable de laisser votre
véhicule dans l'ancien village.
Il vous faut faire environ 100 mètres à pied pour découvrir l'église.
Pendant ce trajet vous pourrez contempler le superbe paysage qui vous
entoure et ce charmant petit village qui a été terriblement marqué par
les catastrophes qui s'y sont déroulées.
2) Pourquoi s'être intéressé à cette église?
Ayant acheté un ouvrage intitulé " Institut des fouilles de préhistoire
et d'archéologie des Alpes Maritimes (années 1954-1955) ", j'ai eu la
surprise de découvrir à la page 118, ce qui suit: - "
Liste
des édifices des Alpes Maritimes, portés à l'inventaire supplémentaires
des monuments historiques "; je passe jusqu'à Roquebillière; " Église
des Templiers (28 Février 1927) " Ceci suffit pour attirer mon
attention. J'ai donc recherché si l'on pouvait accorder quelques crédits
à cette appellation! Un érudit local, Mr MUSSO a écrit un livre sur son
village en 1910, non achevé malheureusement (bibliothèque municipale de
Nice, coté (RES.10.212). Bien que n'ayant trouvé aucunement la
nomination de TEMPLIER, j'ai cependant pu lire page 12, que les
chevaliers de Saint Jean de Jérusalem étaient présents dès 1141 à
Roquebillière, grâce à un acte de donation de Pierre Evêque de Nice
concernant une église située au Plan de Gast. (Cartulaire de l'ancienne
cathédrale de Nice; Caïs de Pierlas - 1902 -). Dès lors l'histoire de
Roquebillière est intimement liée à celle des Chevaliers de Saint Jean
de Jérusalem. (Nous retrouvons à diverses époques, des actes concernant
des redevances ou autres litiges, survenus entre les habitants et les
chevaliers). Ayant là une base fort intéressante et officielle, j'ai
donc entrepris d'aller visiter l'église en question.
3) L'église Comme nous avons pu le
lire dans l'histoire de Roquebillière par Mr MUSSO, l'église
existait déjà en 1141 (acte de donation aux chevaliers de Saint
Jean). Ce qui tendrait à prouver son existence antérieure: qu'en
est-il au juste?
Visite extérieure: L'église se présente d'assez grande dimension,
élevée sur deux étages et flanquée d'un clocher. Bien qu'elle soit
en partie cachée par une petite colline, une remarque s'impose: la
base de l'édifice est construite en très belles pierres de taille
bien ordonnées, ce qui laisserait supposer un réemploi (ceci nous a
d'ailleurs été confirmé); peut-être les restes d'un temple romain?
L'édifice ne laisse malheureusement apparaître que sa façade
principale et un côte latéral. Le reste n'est séparé de la colline
ou de la forge que par un petit chemin d'environ deux mètres de
large. Cela nous masque l'ensemble du bâtiment. Mais les détails
restants ne manquent pas d'intérêts. Outre
cette splendide base, on peut contempler deux magnifiques croix: -
La première située dans la façade latérale représente la croix de
Malte (toute aussi belle que celle de Montfort/Argens). - La
deuxième sculptée sur un des côtés du clocher (toujours sur la
même façade) et qui représente.....une énigme, car: certains y
voient la croix du temple et d'autres la première croix des croisés.
Un très beau clocher, malheureusement abîmé par l'adjonction d'une
horloge et offrant la date de 1665, flanque ce monument. A ce sujet,
un tableau placé à l'intérieur nous prouve que sa hauteur fut
réduite d'un étage. L'ensemble ne choque pas du tout et imposerait
plutôt le respect.
4) Visite intérieure: De
construction romane, l'église a subi une quantité de remaniements, dus à
son importance (n'oublions pas que Roquebillière fut un prieuré prospère
des chevaliers de Saint Jean dans l'ancien Comté de Nice). De plus la
population ayant dû fuir à plusieurs reprises les villages détruits,
l'église servit souvent de refuge. Ceci pour expliquer l'état actuel de
construction qui s'apparente plus au gothique. En pénétrant dans le
sanctuaire, on est saisi par la beauté qui se dégage de l'ensemble. Il
est divisé en trois nefs: une principale et deux latérales, aux très
classiques croisées d'ogive. Quatre paires de piliers massifs reliés par
des arcs en plein cintre délimitent cinq travées. De part et d'autre des
nefs latérales, des pilastres complètent l'alignement. La plupart des
chapiteaux ont reçu des sculptures très particulières, toutes
différentes hormis une tête de bélier, qui se retrouve en cinq occasions
et qui indiquent l'orientation de l'édifice. Il est indubitable que ces
"décors" ont une signification très spécifiques...... Malgré les
richesses contenues, il n'y a pas de surcharge. Quelques beaux retables
et quelques belles toiles ornent les différentes chapelles. L'une
d'elles représente un chevalier tenant une bannière, agenouillé devant
un évêque. Par quatre fois un signe y est représenté, "une croix
templière". Quelques mètres plus loin, dans une chapelle latérale a été
placé le tableau le plus ésotérique de cette église. Il s'agit d'une
œuvre du 17ème où début du 18ème siècle comportant dans son décor un
nombre important de symboles alchimiques (les 7 degrés de la sagesse,
l'acacia, le miroir, la lune, le soleil, etc...). A lui seul ce tableau
mérite la visite. Près du chœur, à gauche, la responsable des clefs vous
ouvrira un battant vous permettant d'admirer un magnifique gisant du
Christ. Plusieurs témoins ont affirmé avoir ressenti une vive émotion
lors de cette observation... Il faut savoir qu'à la fin du 17ème siècle
vivait un prieur qui s'appelait ACHIARDI de l'Alpe, qui procéda à
plusieurs transformations, notamment la fermeture de la crypte qui
depuis ce jour n'a plus reçu de visite. Personnage très obscur, il
écrivit une histoire de la région qui fut recopiée en quatre
exemplaires. Deux sont connus mais incomplets, un troisième fut détruit
et le quatrième disparût? Et nos templiers dans tout cela? Les archives
des Hospitaliers conservées à Nice nous laissent supposer qu'au début de
sa construction, cette église a pu appartenir à l'Ordre du Temple.
Cependant, ces mêmes archives attestent que l'Ordre de Malte a toujours
enregistré des bénéfices grâce à elle. Nous serions tentés de croire que
seule la légende accrédite la thèse templière; mais force nous est faite
d'admettre cette appartenance grâce à la découverte d'un élément
architectural inattendu. En effet, si une des façade présente en son
centre la croix de Malte gravée dans la pierre (marque de possession des
Hospitaliers), que penser de la croix du Temple sculptée dans un blason
et figurant juste au-dessus de la porte d'entrée latérale? L'énigme
reste entière... Un érudit local a situé l'emplacement de ces derniers
au Hameau de Gordolon où se trouve une vieille chapelle en ruines. Chose
surprenante, tout le mobilier et les accessoires échurent à
Roquebillière..... et c'est peut-être à cause de cela que l'église fut
mentionnée comme possession templière, la distance séparant les deux
étant infime. La proximité de Saint Martin Vésubie et de Notre Dame des
Fenestres où vécurent vraiment les Templiers fait divaguer certains de
nos contemporains. Cependant, cette église dans sa spécificité nous pose
plus de questions qu'elle ne nous donne de réponses. Pour conclure:
L'église de Roquebillière construite vraisemblablement à la fin du 12ème
siècle, transformée jusqu'à la fin du 17ème siècle contient tant dans sa
décoration intérieure qu'extérieure un certain nombre d'éléments
attestant de son appartenance à: - L'Ordre du Temple puis à l'Ordre de
Malte. Ses chapiteaux témoignent de la volonté des uns ou des autres à
faire de ce lieu un centre initiatique. Au 17ème siècle sous la conduite
de notre fameux prieur ACHIARDI, cette église a été agrémentée, voire
complétée, d'une autre volonté d'ésotérisme en la dotant de tableaux et
de peintures murales relevant de l'alchimie ou d'autres voies
initiatiques. C'est pourquoi ce site de Roquebillière aujourd'hui
totalement oublié doit tel le phénix renaître de ces cendres. Nous vous
invitons donc à vous rendre sur les lieux afin de mieux appréhender
l'ensemble des éléments composant ce site. * Plusieurs auteurs versés
dans les ouvrages à sensation cherchent à dénouer les fils de cette
connaissance... (Peut-être dans l'espoir d'écrire un ouvrage à
révélations: NDLR)
INTÉRIEUR DE L'ÉGLISE
Longueur :
environ 30 m - Largeur : environ 15 m - Hauteur: dans la nef centrale 6
mètres à peu près. Il y a huit piliers massifs, ainsi que 16 pilastres.
Un très beau bénitier mérite l'attention.
1)
Détails des chapiteaux :
Têtes
de béliers servant à indiquer les quatre points cardinaux, ainsi
que le point zéro, cinq fois représentées.
|
Pointes
de diamant |
Une
croix grecque |
Une
croix de Malte |
Le
labyrinthe |
Un
huit hermétique |
Le
soleil |
Un
nœud |
Une
croix |
Chrisme |
Une
échelle |
Relief |
Avec
en plus des sculptures représentants des feuilles de TRÈFLE, d' ÉRABLE,
et différentes formes de relief. Je finirai en mentionnant trois
sculptures abîmées. Un serpent, un escargot, un lion. De plus le
bénitier présente une décoration que l'on retrouve sur les colonnes du
Temple à JÉRUSALEM.
2) La nef principale.
Elle présente une nuance très surprenante. La hauteur à partir de tous
les sommets des chapiteaux diffère visiblement selon l'endroit où l'on
se trouve. De même les circonférences changent de plusieurs centimètres
selon les piliers - (1m75 à 1m80).
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