IV - MÉTHODES EMPLOYÉES
Modes de faire valoir
:
a- le faire valoir direct est le système
couramment employé. La famille paysanne exploite ses propriétés
éparses sans aucune aide extérieure.
b- Particularités locales pour le fermage et le métayage : La
mise en congé est signifié aux intéressés 6 mois à l'avance.
L'entrée en jouissance prend date au printemps ou en automne. Le
propriétaire fournit les semences, le métayer apporte les instruments,
le fumier et son travail. Le propriétaire assure l'entretien des
canaux, le métayer se charge de l'arrosage et " remonte " les
murettes effondrées. En ce qui concerne plus spécialement la question
du bétail, le propriétaire confie au métayer une ou deux vaches. 4
années plus tard, le cheptel né est partagé. Depuis 1940, la pratique
du métayage a subi une extension très nette, beaucoup de
propriétaires habitant la ville, étant désireux de tirer un
bénéfice de leurs terres abandonnées. On compte aujourd'hui, 200
propriétaires, 0 fermier, 40 métayers. 5% des contrats sont des baux
écrits et 95% sont sous forme de conventions verbales.
Systèmes de cultures :
a- Les combinaisons culturales :
habituellement, l'assolement est triennal :
céréales -> pommes de terre ou haricots -> légumineuses
fourragère. Deux cultures sont parfois associés sur la même sole
: Maïs et haricots, Maïs et pommes de terre ou blé et trèfle. Les
cultures destinées à la seule alimentation du bétail sont de faible
importance. On compte peu de prairies artificielles et de culture
purement fourragères. Le maïs lui-même est avant tout utilisé pour
la consommation familiale.
b- Les cultures sont plus extensives qu'intensives : D'abord
parce que l'exiguïté des terrasses se prête mal à la culture
intensive, ensuite parce que l'on utilise peu les engrais
complémentaires et que les méthodes de culture sont loin d'être
rationnelles. Comment dans ces conditions, espérer obtenir de grands
rendements !
c- Choix de productions : Il est guidé en premier lieu par les
besoins familiaux. Il s'agit moins de produire pour la vente que pour
subvenir à la consommation familiale. Si la conformation et le climat
locaux s'y prêtaient, l'écoulement des productions ne poserait pas de
grand problème, car Nice et ses 250.000 bouches à nourrir, n'est pas
très éloignée. Mais dans les conditions physiques existantes ce n'est
là qu'une supposition gratuite.
d- Conclusions : Certes, la grande production n'est que pure
utopie, mais les rendements peuvent être sérieusement améliorés,
surtout si le paysan comprend la nécessité de porter le maximum de ses
efforts dans l'élevage et l'arboriculture fruitière, réalisant ainsi
un commencement de spécialisation. Les rendements peuvent également
être améliorés en bannissant la culture de produits différents sur
une même planche, en appliquant le principe de la culture améliorante,
en usant de la pratique des engrais verts, en remédiant à une fumure
parfois déficiente, par la substitution de l'assolement quadriennal au
triennal faisant apparaître ainsi une prairie artificielle entre le
blé et le maïs. L'amélioration des rendements est fonction de ces
quelques observations. Atteindre des méthodes de culture plus
rationnelles que les pratiques routinières actuelles, tel doit être
l'idéal du futur agriculteur lorsqu'il quitte l'école. Et c'est à
nous éducateurs qu'il appartient de dispenser la lumière dans le cœur
des jeunes ruraux.
V - LA PRODUCTION
A- PRODUCTIONS VÉGÉTALES
1/ MISE EN PRODUCTION DU
SOL
a- Amélioration foncières : - Collectives
: Nous venons de voir que le remembrement tellement utile à
l'augmentation des productions et à l'allègement des peines du
cultivateur est chose quasi impossible. Notons encore que le
démembrement par héritage cause aujourd'hui moins d'individualité
qu'autrefois. En effet, dans la plupart des familles un enfant quitte la
terre pour aller s'établir à la ville, abandonnant sa part à ses
frères cultivateurs. L'assainissement du sol ne pose pas de problème
important. Quoique les terres soient souvent très argileuses, aucun
drainage ne s'impose en raison des fortes pentes et la disposition en
terrasses. L'irrigation est chose absolument primordiale par suite de la
sécheresse des étés et le système actuel des canaux d'arrosage
mérite tous les soins qu'on lui porte. On pourrait limiter les dégâts
causés à ces canaux par les éboulements qui sont fréquents, en les
cimentant et en les couvrant, tout au moins dans les passages où se
produisent les éboulis. Mais ces travaux déjà entrepris pour le canal
du Caïre nécessitent de grandes dépenses. On gagnerait aussi à
reboiser certains terrains incultes qui sont difficilement irrigables et
accessibles. Actuellement on coupe beaucoup mais on plante peu. On
devrait mettre en honneur la formule : " j'abats un arbre, j'en
plante trois ". Individuelles : Deux propriétaires voisins en deux
quartiers différents auraient intérêt à échanger des parcelles de
même valeur, comme on l'a vu à propos du " regroupement de la
propriété ". Depuis 1940 on a défriché des terres inexploitées
jusqu'alors. Actuellement on ne trouve plus de jachères. Mais le sol
est insuffisamment défoncé (30 cm au maximum). L'aménagement de
certains sentiers s'impose. Ils sont en général trop étroits, trop
accidentés et rendent difficile et pénible aux hommes et aux animaux
l'accès des terres et pâturages auxquels ils conduisent. On plante
souvent des arbres fruitiers en bordure des terrasses et au dessus des
murettes de soutènement, ce qui est gênant s'il y a mitoyenneté, et
ce qui détériore ces murs de pierres sèches.
b- Travail du sol : Nettoyage : Il est facile à réaliser sur
ces planches de superficie réduite. Les différents sarclages
permettent de détruire les mauvaises herbes et le système de rotation
(plante nettoyante succédant à une plante salissante) aide également
au nettoyage du sol. Les procédés chimiques ou la jachère ne sont pas
employés. Enfin, l'épierrage est insuffisant. Ameublissement : Il est
obtenu par les labours du printemps et les quasi labours de l'automne.
On défonce d'abord pour nettoyer. Les herbes sont arrachées,
entassées en brûlots et non enfouies. On repasse ensuite pour enterrer
le fumier, émietter et égaliser. Les labours sont exécutés à la
houe de 3 ou 4 dents. Quelquefois, sur les planches les plus étendues
on procède d'abord à un labour superficiel de 20 cm environ, à l'aide
d'une petite araire tirée par un mulet. Ce labour est exécuté
irrégulièrement et on repasse ensuite à la houe à dents. Dans les
sols les plus argileux, on ne peut labourer que 7 ou 8 jours après les
pluies. Améliorations : L'usage de la charrue et de la herse pourrait
être généralisé au moins dans les grandes planches. Il allégerait
considérablement la tâche du laboureur. On devrait aussi augmenter la
profondeur des labours, et les effectuer plus tôt, avant les grands
froids qui par le gel ameublissent les sols trop lourds. Enrichissement
du sol : On utilise guère que le fumier de ferme auquel on ajoute
parfois des composts sommairement préparés avec les ordures
ménagères, les cendres, etc. L'engrais humain ignoré au nouveau
village est encore précieusement recueilli au Vieux et il est utilisé
pour les cultures potagères. Les engrais chimiques sont de plus en plus
populaires. La coopérative en multiplie les commandes depuis 2 ans. Il
s'agit surtout d'engrais complets et d'engrais potassiques. Le fumier
est employé à raison de 200 kg à l'are. Les doses répandues pour les
engrais sont bien souvent fantaisistes. Les fumures sont surtout
enfouies au moment des grands labours du printemps. En raison de la
nature du sol, peut-être vaudrait-il mieux, labourant plus
profondément en automne, les enfouir à ce moment. L'épandage du
fumier en couverture sur les prairies naturelles est à éviter.
L'aménagement de fosses à purin permettrait d'utiliser ce produit dans
ce genre de fumure. On commence à répandre des super phosphates et des
engrais complets en hiver. Il est à souhaiter que l'on donne aux
paysans et dans un bref délai, une connaissance plus approfondie de la
nature, des qualités et de l'emploi des engrais chimiques.
2/ PROTECTIONS DES
CULTURES
a- Contre les intempéries : On protége
seulement de la gelée certains légumes, au moyen d'écrans de
branchages, de paille, de tiges de maïs. Aucune autre culture n'est à
protéger contre le froid, puisque seul le blé occupe la terre en
hiver. Le relief protège suffisamment contre le vent d'ailleurs
rarement violent. Rien n'est prévu pour prévenir les dégâts
occasionnés par la grêle.
b- Contre les ennemis animaux : On ne débarrasse pas les
prairies des taupes qui en dépit d'une irrigation importante
réapparaissent toujours. Les rongeurs ne posent pas de problème
particulier, car l'hiver rigoureux empêche leur trop grande
multiplication. Le doryphore commence à envahir les cultures de pommes
de terre depuis 2 ans et la commune est organisée pour ce genre de
lutte. Les insectes parasites des jardins et vergers peuvent vivre en
toute quiétude. Jusqu'ici on n'a pas fait grand' chose pour les
détruire. C'est ce qui explique le fort déchet que l'on enregistre
dans la production fruitière. On commence cependant à effectuer
quelques traitements avec des pulvérisateurs à dos. Mais avec ce genre
d'appareils, ces traitements ne peuvent être qu'insuffisants.
c- Contre les ennemis végétaux : Aucune mesure n'est prévue
pour débarrasser les prairies de leurs plantes parasites (colchiques,
joncs, renoncules et surtout mousses). L'emploi des scories
améliorerait notablement les récoltes fourragères. Le bois des arbres
fruitiers est suffisamment propre pour pouvoir se passer d'un traitement
spécial. Les semences ne sont pas toujours soigneusement nettoyées.
L'assolement favorise la destruction des mauvaises herbes que le
cultivateur prend soin également de brûler. Binages et sarclages sont
efficaces, mais on ignore tout ou presque de l'emploi des agents
chimiques.
d- Conclusions : Qu'il s'agisse du blé, des pommes de terre, des
arbres fruitiers ou des cultures potagères on applique rarement un
traitement approprié contre les maladies et les parasites. Le plus
souvent on se contente d'une unique pulvérisation à la bouillie
bordelaise ou avec une simple solution de sulfate de cuivre. Parfois on
badigeonne les troncs des arbres au lait de chaux. Quelques rares
initiés utilisent le volk nicotiné que leur vend la coopérative. Il
serait souhaitable que l'école saisonnière d'arboriculture fruitière
ouverte en décembre 1947 par les services agricoles, connaissent
d'autres sessions dans les mois à venir. Une éducation complète est
absolument nécessaire dans ce domaine.
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