Monographie de Belvedere - La Gordolasque - Vallée de la Vésubie, 06450 Alpes Maritimes - Côte d'Azur - France

TRESORS de BELVEDERE

Fontaine

   A la fin du XIXème siècle se fit sentir le besoin d'améliorer qualitativement la vie quotidienne des Belvédérois. Ce fut naturellement à l'autorité municipale que revint la charge d'y pourvoir, en organisant l'adduction d'eau potable. Les énormes frais nécessaires au captage et à l'acheminement de l'eau, tirée de sources résurgentes de la rive droite de la Gordolasque, obligea la commune à s'endetter. Un important dossier fut constitué. De nombreux intervenants furent sollicités. L'autorité préfectorale devait accorder l'autori-sation pour la contraction de 1’emprunt. Les interventions du député et du sénateur locaux auprès des instances de l'État furent sollicitées. Ce furent les acquisitions des terrains nécessaires et l'indemnisation des propriétaires qui furent finalement les étapes les plus rapidement franchies, l'intérêt collectif le demandant. Au début de notre siècle, l'eau potable arriva finalement sur la place de l'église.

 

Monument aux morts

   Immédiatement après la. guerre de 19141918, Belvédère se prononça pour rendre hommage à ses enfants disparus dans cette catastrophe mondiale. Un autel fut érigé à leur mémoire dans l'église paroissiale (l’autel "des Grands Morts"). A la suite de la destruction de l'ancienne chapelle des Pénitents noirs du village, accolée à ce même édifice, il fut érigé en lieu et place un autre monument aux Morts, entre l'église et la Mairie du village. Simple stèle funéraire rappelant les noms des disparus, elle est entourée de l'espace sacré de la Nation.

 

Façade de l'église

 

   L’église paroissiale Saints Pierre & Paul était, au début de notre siècle, plus avancée que de nos jours. Sa façade se situait sur le même plan que le clocher. Quand il s'agit de permettre l'accès routier au cœur du village, la commune décida d'élargir la rue principale, en coupant les maisons sur toute sa longueur. Il en fut de même pour l'église dont les escaliers empiétaient largement sur la nouvelle chaussée. Ainsi fut repoussée sa façade sur près de 5 m de profondeur, amputant l'édifice d'une travée entière. Son décor extérieur fut tout de même conservé ou reproduit à l'identique.

 

 

 

 

Façade de la Mairie

   Lors des travaux d'élargissement de la place de l'église, la Mairie elle-même fut touchée. Sa façade fut repoussée de plusieurs mètres. Ces travaux obligèrent à transformer l'une des anciennes entrée du village, dont les traces se décèlent encore par endroits sous le crépi qui recouvre l'accès à la place de la Cour, en direction de l'école. On imagine, une porte ressemblant à celle que l'on connaît de l'autre côté de la Mairie, voûtée, mélangeant les parements de tuf et de calcaire gris.

 

Clocher de l'église paroissiale

   Sur l'angle est de 1'église paroissiale s'élève le clocher quadrangulaire. Son parement régulier, alternant les pierres de tuf et de calcaire gris, son chaînage régulier, donnent une impression de majesté certaine. La façade de l'église venait s'y appuyer avant qu'elle ne soit transformée. Les cloches sont logées au-delà du toit de l'église. Sur son faîte, une tourelle et quatre petites piques rompent avec le modèle de la pyramide. Son caractère inachevé, hétéroclite, en fait la particularité. L'ensemble n'est pourtant pas antérieur au XVIIème siècle. L'horloge a été remplacée en 1999. Le chambrant des cloches également.

 

 

Porte de la « maison du Chevalier »

   Dès que l'on quitte la place de l'église, en remontant par la rue Ferrier, un premier passage couvert s'offre à nous. Malgré ce décor XIXème, cet espace semble plus ancien que le quartier du Fort. Complétant la façade de la "Maison du Tribunal", il ouvre sur la rue. En débouchant, une porte ogivale s'offre à nos regards. De belle composition, celle-ci possède deux détails qui font penser à une origine médiévale, ou au mieux Renaissance. S’il ne s'agit pas ici de croix de consécration (connues à Clans ou à Saint‑Dalmas Valdeblore), il semble proposer une interprétation sociale certaine. La "Maison du Chevalier" (telle que nous l'avons dénommée) présente une sorte d'enclume à hauteur de la courbure de l'ogive. L'étude approfondie du parement extérieur, ainsi que quelques indications intérieures pourraient nous préciser ces orientations.

 

Fonds baptismaux

   Immédiatement à gauche en entrant dans 1'église, se trouve une petite pièce, réservée aux fonds baptismaux. Lieu essentiel de la religion Chrétienne, il ouvre à la vie éternelle promise à tout croyant, par le baptême, l'admission dans la Communauté. Il s'agit d'une importante roche, sommairement taillée pour offrir une vasque (aucune comparaison possible avec ceux des autres villages). Sur l'une de ses faces, se retrouve le blason de la maison de Savoie. Il est vraisemblable qu'il s’agisse là d'un rajout postérieur. Par sa conception "archaïsante", la pièce laisse une impression d'antériorité, totalement étrangère à la conception de l'église qui la renferme. Nous proposons d'y voir l’une des rares pièces ayant appartenu à un édifice antérieur.

 

 

 

Reliquaires

   Le "Trésor" de l'église paroissiale de Belvédère renferme un nombre impressionnant de reliquaires renfermant les restes de saints dont le nom est parfois inconnu et dont les mérites ont aujourd'hui souvent disparu des mémoires. Avant-bras et mains, représentant les parties de la relique ; buste - reliquaire ; simples monstrances... Enchâssés dans des compositions hétéroclites, les reliques sont souvent des bouts d'os, des rognures d'ongles, plus rarement des cheveux. L'une des principales restait l'écharde de la Vraie Croix, que chaque communauté se devait de posséder. "La relique ne s'achète pas. Elle se vole". Le Moyen Age illustra cet adage et connut un important, "commerce" de reliques. La découverte d'une relique s'appelle "l'invention".

 

 

Devant d'autel de l'ancien maÎtre autel de la chapelle des pénitents noirs

   De l'ancienne chapelle de la Miséricorde, anciennement accolée à l'église paroissiale, à l'est, il ne reste que le devant d'autel, dont le cartouche central représente la Vierge de la Miséricorde. Elle est reconnaissable à son ample manteau ouvert pour protéger le peuple Chrétien. La confrérie des Pénitents Noirs à Belvédère est avérée dès le XVIlème siècle, mais rien n'empêche qu'elle ait été présente avant cette époque (à Lantosque, elle est connue à la fin du XVème siècle). Société d'entraide, elle regroupait environ la moitié des habitants, l'autre appartenant aux Pénitents Noirs. Il n'existe vraisemblablement pas de classification sociale dans nos villages, contrairement à ce qui se pratique à Nice (les Noirs sont au nombre de 40 et représentent alors l'aristocratie).

 

Statue du Christ Martyr

   Dans le "Trésor" de l'église paroissiale se retrouve une statue ancienne, aux couleurs passées. Elle représente le Christ, couvert du manteau rouge. Sa physionomie le présente comme un personnage de Douleur, subissant le martyre de la Passion. Sa tête semble couronnée d'épines. Aujourd'hui isolée, elle a vraisemblablement appartenu à un ensemble plus complet, où le Christ devait trôner au centre d'une cène. Une datation, même approximative n'est pas possible par manque d'informations.

 

Meule de difice

   Parmi les moulins présents à Belvédère, certains étaient spécialisés dans la pression des olives. Il y a pourtant peu d'oliviers sur la commune. Ils sont essentiellement concentrés à proximité de la confluence de la Vésubie et de la Gordolasque (altitude 530m), et disparaissent aussitôt que la pente s'accentue (Belvédère se trouve à 820 m d'altitude). Il n'en était pas moins nécessaire de posséder une telle structure pour en obtenir l'huile qui sera consommée dans l'année. Déjà au XVIIIème siècle, les enquêtes Sardes précisaient que cette production existait à Belvédère. Aujourd'hui, les moulins ne fonctionnent plus et certains ont totalement disparu.

 

Vis des moulins

    Cette simple pièce de bois était en fait une partie de la vis centrale d'un ancien moulin à olive. Généralement en bois dur (noyer ou châtaignier), elle pouvait atteindre plus d'un mètre. Elle permettait le serrage des scourtins remplis de pulpe d'olive. Ceux-ci, une fois écrasés, produisaient l'huile (1ère pression à froid). Cette pièce confirme la présence de ces moulins spécialisés à Belvédère.

 

Porte du village

   Un accès principal du village moderne s'effectuait par le quartier du Fort. Une porte fortifiée s'ouvre encore dans cet espace. Son importance et sa structure nous semblent indiquer une origine moderne, au mieux du XVIème siècle, dans un quartier dont le bâti semble de manière homogène dater de cette époque. On y accède par degrés successifs, et sûrement de l'est en venant de l'espace des jardins, ou de l'ouest en longeant le barri. Précédée par une avancée couverte, elle offrait toute facilité à la défense. Ample ogive outrepassée en calcaire gris, elle s’appuie sur des montants de belle facture. Les parements irréguliers, mais laissant entrevoir quelques assises, en font une structure solidement installée.

 

 

Place SAINt Esprit

   Au cœur du village ancien, s'ouvre la place Saint-Esprit. Il s'agit d'un petit espace libre, enserré entre les hautes façades des maisons du village. Mais son histoire est bien plus surprenante que ne pourrait le laisser croire l'exiguïté des lieux. Elle rappelle la présence, à la fin du Moyen Age, d'une confrérie érigée sous ce vocable, qui représentait la Communauté, personne morale politique et économique. Celle-ci s'administrait directement, sous la seule autorité du Comte de Provence puis du souverain savoyard. Son appellation, dans certains documents d'archives, de place de la Confrairia, nous rappelle qu'elle fut le véritable forum du village.

 

 

 

 

Façade de l'ancienne forge MATTEUDI

   Comme tous les villages, Belvédère possède un important patrimoine proto-industriel. L'ancien cadastre (1874) nous indique la présence de 6 moulins, dont 2 sont dits "à farine" ; mais aussi deux forges, et deux fours. Le quartier des moulins s'égraine le long du béal. Le Musée du lait était un ancien moulin. D'autres ont aujourd'hui disparu. La forge "Matteudi" est encore reconnaissable. Tout près, sous le bâtiment la jouxtant, se découvre le bras du rodet qui sort encore de la voûte. Derrière le bâtiment, une meule verticale est appuyée contre le mur, près de la porte d'entrée. La rue qui y mène se dénomme "rue du Paraire". rappelant la présence d'un ancien moulin à foulon, chargé d'écraser les tissus, de dégraisser les draps de laine.

 

Cantoun ou passage couvert

   Une caractéristique de l'habitat alpin de nos régions est la nécessité de construire sur des espaces réduits, afin de rester à l'intérieur des murailles (le barri) du village. De fait, tout l'espace disponible est utilisé. Mais les nécessités de la communication entre maisons oblige à conserver quelques passages. Les rues sont étroites. La liaison entres elles s'effectue par des cantouns ou passages couverts (parfois voûtés), qui permettent de construire au-dessus et d'utiliser les deux murs latéraux pour l'habitat, ce qui économise encore les matériaux de construction. Les lois locales imposaient néanmoins de conserver libre de toute construction ou de toute atteinte l’espace autour des murailles, afin d'y circuler directement et de ne pas offrir de prise à de possibles agressions.

 

 

 

 

 

Maison d'habitation

   L'attrait touristique de la Vésubie, dès la fin du XIXème siècle, a provoqué un important développement de l'habitat. Les nécessités de l'accueil des estivants obligèrent à restaurer les anciennes maisons, et souvent à en construire de nouvelles. Elles s'installent alors dans la continuité des voies automobiles nouvellement créées. Ce sont d'élégants pavillons de plaisance, très rapidement adoptés par la notabilité locale, qui y voit le signe de leur qualité sociale. Alors que l'habitat traditionnel possédait une structure en élévation, les nouvelles maisons adoptent le plan individuel, créant ainsi une grande variété de types, qui en fait l'originalité. Certaines d'entre elles possèdent des frises anciennes sous le toit qui caractérisent le début de notre siècle.

 

Fresque de St Antoine

   Dans la chapelle Saint-Antoine, se découvre, sur la voûte, les restes d'une peinture ancienne. Le personnage est représenté en priant. Il peut être identifié comme Saint Antoine du Désert sans doute soumis à l'une des tentations. Mais le reste de l’œuvre a disparu sous un badigeon blanc. De par sa forme, l’œuvre semble se rattacher aux fresques connues à la fois à Venanson et à La Brigue (Notre-Dame des Fontaines). Saint Antoine prononce quelques paroles dont le sens nous échappe. L'écriture est comparable à celle des fresques citées. Il est possible de la rattacher à l'un des artistes de cette période. Et s’il ne s'agit pas de Canavesio lui-même, il est possible d'y voir son école.

 

Chapelle St Antoine, façade avec treillis de bois

   A l'extrémité septentrionale du village, sur le chemin rejoignant la haute vallée, fut érigée la chapelle Saint‑Antoine. Ce modeste édifice représente en fait un exemple unique dans la vallée du modèle médiéval en l'état. Sa façade est encore largement ouverte (alors que toutes les autres ont été fermées au XVIIIème siècle). Seule une grille en bois sur laquelle s'appuie la porte, en interdit l'accès. L'iconographie, dédiée à son saint éponyme (il a un rôle de protecteur contre les épidémies, ce qui explique sa localisation sur les accès du village), représente trois personnages dont au moins deux peuvent être identifiés à saint Antoine. On y a allègrement mélangé Antoine de Padoue et Antoine du Désert.

 

 

 

Façade de grange et écurie

   Les bâtiments périphériques du village ancien, à proximité des premiers jardins, sont généralement d'anciennes granges ou écuries. Leur haute structure, le peu de soin de leur parement, expliquent qu'il s'agit de bâtiments à usage rural, secondaires. L'importance de l'élevage local, la présence d'un troupeau de vaches laitières, explique la présence des fenils, destinés à conserver le foin nécessaire à l'alimentation des animaux durant la saison d'hiver. La situation frontalière, au débouché de la vallée de la Gordolasque, et le rôle essentiel des convois muletiers au travers des Alpes, jusqu'en Piémont, nécessitait également d'importantes structures d'accueil : les écuries offraient l'espace de repos et de remonte au transit.

 

Tableau de la Crucifixion avec saint Jacques

   Le premier autel, en entrant à droite, est dédié à la Crucifixion. La composition est l’œuvre de Bernardin Baudoin (voir la dédicace : 0pera Iacobi Albanelli-Bernardinus Balduinus Pingebat

Niciae Anno 1693).

 L'auteur est également celui de la "Descente de Croix" de la chapelle des Pénitents blancs de  Saint-Martin Vésubie. La Croix est encadrée à ses extrémités par les disques lunaires et solaires.

Au-dessous, des angelots participent à la compo-sition. Enfin, avec, la Vierge et Marie Madeleine se reconnaît le personnage de Saint Jacques, le pèlerin traditionnel, juste derrière Saint Jean l'Évangéliste.

 

Acquisition d'une nouvelle horloge

Belvédère : 1876

   Dans une délibération municipale du 26 mars 1876, le maire de Belvédère présente au Conseil le projet d'achat d'une nouvelle horloge pour le clocher de l'église. En effet, l'horloge publique en place, "vieille et complètement usée". ne marchait plus. L'édile répondait à une requête de la population qui «en souffre et s'en plaint fréquemment».
Un crédit de 1 200 Francs pour l'achat d'une horloge est voté au budget additionnel de 1875. Mais disposant de peu de fonds, la Commune est contrainte de le réduire à 616 Francs. Belvédère a sans doute traité de gré à gré avec un horloger de Morez-du-Jura (Dép. du Jura, Franche-Comté), Léon TOURNIER, qui semble déjà avoir travaillé pour Nice, Sospel et Levens.

Après bien des tractations, la Commune de Belvédère opte, sur les conseils de l'horloger, pour une horloge de qualité, qui se reconnaît à «la force de sa sonnerie et la solidité de la machine».

Il s'agit d'une horloge « allant huit jours, à heures et demies, et répétition à l'heure ». Attachés à la solidité des mécanismes, les matériaux utilisés sont le cuivre et l'acier. Le coût s'en ressent. Le prix est supérieur à celui envisagé. Il atteint la somme de 975 Francs, à laquelle s'ajoutent les frais de transport (l'horloge est amenée jusqu'à Nice par voie ferrée), qui s'élèvent à 225 Francs, soit une dépense totale de 1 200 Francs, rejoignant ainsi la première estimation. Léon TOURNIER propose à la Commune de faire intervenir un horloger de Nice pour la mise en place de l'horloge dans le clocher, car un déplacement de son personnel aurait coûté trop cher.

A la demande de la Commune, des facilités de paiement sont accordées, permettant de régler la somme en trois traites : la première après la mis en place, la seconde un an après, et la dernière, après les trois années de garantie.

Après 123 années «de bons et loyaux services», elle est remplacée en 1999 par une nouvelle horloge. Devenue un élément du patrimoine local, son mécanisme interne, véritable oeuvre d'art horloger, méritait d'être exposé.

 

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Crédits à: Monsieur Marc ZWILLER

 

Le PORTAIL VESUBIEN, la Vésubie et ses villages dans les Alpes Maritimes.
 
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